‘’Vous pouvez avoir des centaines de doctorats, si vous ne pouvez pas parler votre langue maternelle vous n’existez même pas’’
Après le lancement de son traditionnel calendrier traditionnel, ‘’Un
Parent Commun’’ nous sommes allés à la rencontre de Dah Alligbonon Akpochihala
Essoumon. A son domicile qui fait en même temps office du siège de l’ONG les
retrouvailles et Echanges culturels de l’ère Adja-Tado, pour le développement
économique et social (Recades), la reine mère de tous les rois du Sud Bénin,
puisque descendant de la Princesse Alligbonon, s’était entretenu avec nous au
sujet du calendrier traditionnel et de la perte de nos valeurs ancestrales.
Lisez ici l’essentiel de cet entretien avec ce garant de nos valeurs endogènes.
Pourquoi avoir intitulé le Calendrier traditionnel ‘’Un Parent
Commun’’ ?
Dah ALLIGBONON AKPOCHIHALA Chef du Culte Vodoun |
Bon c’est tout à fait simple. Moi
je ne t’ai jamais connu, tu ne me connais pas non plus, mais tu es venu ici
chez moi. Alors si nous commençons à rentrer dans l’histoire, il se peut qu’on
se retrouve dans une même maison maternelle ou paternelle. C’est un homme et
une femme qui créent une famille qui devient plus tard une communauté au fil
des ans. Chez les musulmans aussi ça commence quelque part, je ne peux pas dire
que je ne suis pas musulman et un musulman qui dit ne pas être traditionnaliste
se trompe. C’est sont des enfants de Vodounsi, de Vodounnon, de Bokonon, de
Guérisseurs qui ont accepté l’Eglise Catholique. Donc donner ‘’Un parent Commun’’ au calendrier, cette une
manière de ramener la paix et éviter la guerre civile. Il n’y a plus de fon
pur, ni de yorouba pur, nous sommes en quelques sorte, tous des métis. Et si je
reconnais que nous sommes de la même famille, il nous sera difficile de se
livrer la guerre jusqu’à penser à enlever la vie à quelqu’un.
Dans quel but éditez-vous le calendrier traditionnel ?
Je fais le calendrier
traditionnel dans l’intention de faire la promotion de la tradition, parce qu’aujourd’hui
vous êtes d’accord avec moi que tout le monde a abandonné la tradition. Partons
du simple analphabète du village au Bénin, celui là qui n’a jamais été à
l’école ne peut pas parler sa langue maternelle sans y mettre puisque ;
donc. Alors tous ces mots sont-ils dans nos langues nationales ? Si on continue
comme ça, dans un ou deux décennies après nos langues maternelles vont
disparaitre. Et pire ce sont les intellectuels qui mélangent tout. Aujourd’hui,
l’enfant de moins de deux ans, on lui parle le français alors qu’il na pas fini
de comprendre sa propre langue. Ça, c’est défi à relever. Je n’ai jamais vu
quelqu’un prendre un alphabétiseur en
fon pour son enfant, mais on prend les alphabétiseurs en allemand et en
espagnol. C’est si triste qu’aujourd’hui on rencontre des gens complètement
déracinés, des navires sans boussole pratiquement. Ceux-là ne sont ni blancs,
ni noir, ni béninois, ni français, ils ne sont rien du tout. Si vous ne pouvez
pas parler votre langue maternelle mieux vaut de mourir, vous pouvez avoir des
centaines de doctorats, vous n’existez même pas. Sur le calendrier, il y a les
365 noms béninois ou africains, que nos ancêtres donnaient aux enfants et qui
se marient d’ailleurs aux noms des Saints. C’est d’ailleurs une première dans
l’histoire de l’humanité.
Alors Dah qu’est-ce que ce calendrier pourra concrètement apporter aux
béninois en général et aux jeunes en particuliers ?
Je dis que le calendrier traditionnel
va beaucoup apporter, parce qu’aujourd’hui, vous savez, dans certaines familles
on vous oblige déjà à donner au nouveau né un nom traditionnel, or ce fut ces
mêmes personnes qui avaient refusé de donner ces noms aux enfants. C’est déjà
un acquis et c’est à mettre à l’actif du calendrier traditionnel. En tant
normal et dans la tradition, si vous mettez votre premier enfant au monde,
c’est à votre père de lui donner un nom, parce que c’est lui seul qui sait les difficultés
qu’il a rencontré avant d’épouser votre maman. Après ça on fait la cérémonie
dite ‘’Agbassa’’ pour déterminer le père ou la mère spirituel, c’est-à-dire le
‘’Djotô’’ de l’enfant. C’est quelque chose qui donne une chance formidable aux
enfants. Le Djotô est plus cher que ton papa, parce qu’il avait vécu et il est
revenu en toi, si tu le respectes, l’adore, il constituera pour toi une source
intarissable de bonheur. Aujourd’hui on retrouve des gens sérieux, compétents
avec plains de diplômes, mais qui ne trouvent rien à faire, simplement parce
qu’il ne connait pas son Djotô. C’est un calendrier qui vous permettra, lettré
ou pas de maîtriser votre histoire, vos origines.
Pourquoi le calendrier de cette année porte-t-il l’effigie du chef de
l’Etat Boni Yayi ?
Vous savez, il n’y a pas un chef
d’Etat qui a fait que du mal. Il fera certainement des victimes et dans le même
temps des heureux. C’est le monde qui est comme ça. Si j’ai mis le calendrier
du président c’est tout à fait simple. Depuis 1861, jusqu’à nos jours, aucun
gouvernement n’a pu penser à
subventionner le monde traditionnel. J’ai toujours dit dans mes interventions
que ce n’est pas le montant que j’apprécie, mais l’idée. Aujourd’hui tout le
monde veut être roi, c’est bien même s’il y a de la profanation, mais c’est une
promotion à la tradition. C’est considérable et c’est grâce à Boni Yayi.
Mais Dah, vous en tant que garant de nos valeurs endogènes, qu’elles appréciations
faites-vous de la dépravation des mœurs
et ses corollaires ?
Non tu sais avant de poser la
question. Dans cette affaire là, moi je condamne beaucoup plus les grandes
femmes, puisque les enfants quoi qu’on dise écoutent plus leur maman que leur
papa. Parmi donc ces femmes je trouve des hypocrites, parce qu’elles mêmes ne
sont pas des repères. La jeune fille ou le jeune garçon ne sont pas des titres,
il y a un temps et après on devient grand garçon et jeune dame. Mais dans les
foyers, lorsque les comportements des enfants commencent par se dégradés et que
l’homme en parle la femme refuse. Les mamans sont des complices de tout ce qui
arrive, mais par hypocrisie, on dit qu’on veut la promotion de la femme. Si
c’est ce qu’on veut vraiment, alors qu’on favorise d’abord leur éducation. Ces
femmes dont on parle ont vécu des choses, elles ont acquis des expériences,
elles ont évolué, mais ne veulent pas de l’évolution des filles et garçons.
J’invite les femmes qui veulent que leurs enfants changent de comportement à
venir à mon école et nous allons travailler ensemble. Aujourd’hui on ne
respecte plus les principes de la
nature. Tout est à l’envers, nous marchons la tête en bas les pieds en haut.
Justement Dah, dans ce sens de la dégradation des comportements, vous avez eu la géniale idée de créer une
Académie traditionnelle, quels seront les attributs de cette Académie ?
Bon d’aucun pensent que l’Académie
traditionnelle, c’est pour les jeunes, c’est faut c’est ouvert à tout le monde.
Car les choses ont commencé à se dégrader depuis 1861, à l’arrivée des colons.
Je le dis parce qu’au temps de nos grands mamans, personnes ne connait
l’avortement provoqué. Il venait naturellement et de lui-même. Mais à l’arrivée
des colonisateurs, ils ont commencé à apprendre ces choses là aux nôtres. Donc
l’Académie doit travailler avec des jeunes, qui seront formés et qui formeront
à leur tour d’autres jeunes. On travaillera avec dignitaires de nos départements qui maîtrisent
les rituels pour qu’ils enseignent à ces dignitaires qui ne maîtrisent pas
grand-chose dans les rituels de leurs communautés. Les jeunes seront éduqués
sur les manières de gérer et de conduire les destinées de nos valeurs endogènes
et de nos communautés, afin qu’ils ne se voient pas en victimes accomplis pour
les sorciers ou dignitaires du village et se constitués en exilés volontaires.
Il y aura un département des historiens qui se chargera de renseigner les
touristes et autres qui viennent chez nous pour des recherches sur notre
histoire.
L’ONG Recades, ce n’est pas que
le calendrier traditionnel, ce n’est pas que l’Académie, elle a publié nombres
d’ouvrages, citez-nous en quelques-uns ?
Vous savez, j’ai fait l’armoirie
du Bénin, puisque l’armoirie que nous avons, c’est à partir de Hxwawé et ça
échoue à Abomey, c’est ce que nous utilisons partout. A partir de ce tapis,
vous avez tout le Bénin entre vos mais comme on le dit. En l’an 1000, le Bénin était un, on ne
connaissait ni Nord ni Sud. C’est après l’an 1000 qu’il y a eu éclatement et
nous nous sommes retrouvés à Tado au XIIIe Siècle. Nous avons publié après,
‘’Vodoun au service du développement de l’être humain’’, parce qu’il faut des
armes aux adeptes du Vodoun. Donc c’est en quelque sorte une bible cette petite
plaquette où j’ai parlé du Vodoun de façon simple chaque divinité et son rôle. Prenant en compte les lois de la nature
et les dix commandements, j’ai fait éditer le livre ‘’Gbèssou’’. Mais beaucoup
d’autres sont en cours de publication et l’Académie traditionnelle sera
officiellement lancée le 16 mars 2013.
Propos recueillis par Patrick Hervé YOBODE
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