vendredi 8 mars 2013

Cinéma/TV

La mort annoncée du Fespaco

 
Fespaco 2013
Le Fespaco est-il en train de mourir ? Telle est la ques­tion que nous sommes en droit de nous poser aujourd’hui. Il y’a encore quel­ques années, pour les habi­tués de cette messe du 7ème art afri­cain, le Fespaco se vit depuis les fron­tiè­res. Arrivé à Ougadougou, nul besoin de cher­cher les salles, le cinéma accueille ses ciné­phi­les.
Jean-Paul, un expa­trié vivant à Ouagadougou estime que cette année le fes­ti­val est moche. A-t-il raison ? Dans son quar­tier, lors de la 22ème édition, il y avait encore une salle qui pro­po­sait des pro­jec­tions de films. Il y allait avec sa famille. Cette année, la salle n’offre pas ses ser­vi­ces. Après avoir subit une longue queue devant une salle de pro­jec­tion, Jean-Paul s’indi­gne de l’orga­ni­sa­tion. Le Fespaco, dit-il, c’est pour les afri­cains, c’est pour que les popu­la­tions puis­sent appré­cier les films afri­cains, mais on dirait que de plus en plus le Fespaco tend à se tour­ner vers un public occi­den­tal. Les salles de cinéma sont en train de dimi­nuer au fil des années, et la pro­gram­ma­tion des films reste à dési­rer.
Kaboré Pascal lui, dit après avoir visionné quel­ques films en vidéo numé­ri­que qu’ils peu­vent bien sûr pré­ten­dre au célè­bre étalon. Les orga­ni­sa­teurs en ont décidé autre­ment. Indigné, Benoît, un autre expa­trié fus­tige le rai­son­ne­ment de Michel Ouédraogo, le délé­gué géné­ral du Fespaco et de son équipe. « Ils ne veu­lent pas accep­ter de sélec­tion­ner des BONS films tour­nés en vidéo numé­ri­que et les dif­fu­ser en format semi pro­fes­sion­nel, comme le sont déjà les CM, DOC et 90% de la sélec­tion en com­pé­ti­tion. Car cela n’est pas un format pro­fes­sion­nel comme l’était le 35mm, et que le Fespaco s’accro­che à vou­loir jouer dans la cour des grands, comme Cannes. Le Fespaco n’a pas la poli­ti­que de ses ambi­tions et fait un com­plexe, le com­plexe de l’Africain qui veut faire comme les Européens. Monsieur le bur­ki­nabè veut du DCP(1), la norme numé­ri­que pro­fes­sion­nelle impo­sée par les lob­bies des majors de la dis­tri­bu­tion qui exploi­tent les salles du Nord. Pour pous­ser le bou­chon, ça veut dire que Ouedraogo vou­drait équiper ses salles en DCP, qui vont accueillir uni­que­ment des films de blancs... pour les blancs », dit-il.
Quoi qu’il en soit, le Fespaco est en train de deve­nir autre chose qu’une ren­contre de cinéma. Une retrou­vaille fes­tive peut-être…. Mais ras­su­rons-nous le Fespaco n’est pas encore mort. Malgré les tâches dans l’orga­ni­sa­tion, les accré­di­ta­tions que l’on ne peut récu­pé­rer après s’être ins­crit en ligne, le désert ambiant de l’hôtel Azalaï, autre­fois le temple des ren­contres des célé­bri­tés, ou encore l’absence de visi­bi­lité du fes­ti­val, les thèmes récur­rents des mêmes col­lo­ques avec les mêmes ora­teurs…. Par contre une touche posi­tive, le trans­fert du MICA au centre ville. Le Fespaco peut être sauvé, le Fespaco doit être sauvé. Il n’appar­tient désor­mais plus seu­le­ment au Burkina Faso, mais aujourd’hui, c’est un ado­les­cent qui doit pou­voir voler des ses pro­pres ailes.
Candide Etienne
1 - DCP : le Digital Cinema Package peut être consi­déré comme l’équivalent d’une copie 35 mm mais en format numé­ri­que, norme mis en œuvre par les dis­tri­bu­teurs et exploi­tants. Il existe plu­sieurs normes uti­li­sées pour la dif­fu­sion du cinéma en salles ; La prin­ci­pale a été défi­nie par le Digital Cinéma Initiative (DCI), qui regroupe sept majors du cinéma amé­ri­cain que sont Disney, Fox, Paramount, Sony, MGM, Universal et Warner Bros. Mais il y a aussi les normes AFNOR qui per­met­tent de pro­je­ter les copies dans n’importe quelle salle numé­ri­que. Le 2K cons­ti­tue la réso­lu­tion mini­male exigée par le DCI et l‘AFNOR, qui est une image formée de 2048 pixels par ligne et de 1080 pixels par colonne.

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