dimanche 1 septembre 2013

Hommage de la Nation au roi du tchinkounmin


Alokpon ne vivra désormais qu’à travers ses œuvres et sa relève


Le palais des sports de Kouhounou a accueilli, le vendredi dernier, la dépouille mortelle du roi du tchinkounmin. La Nation béninoise avait donné rendez-vous à ses filles et fils pour rendre un dernier hommage à cet autre digne fils, qu’aura été dans plusieurs domaines, Anatole Hountchédé Houndeffo. Après ces honneurs du Bénin Alokpon a été conduit à sa dernière demeure à Ouèssè son village natal.
Le roi Alokpon

C’en est définitivement fini, l’âme du roi du tchinkounmin repose désormais en paix dans son Ouèssè natal. Anatole H. Houndeffo, né le 02 septembre 1940 et décédé le 24 juin de cette année, Alokpon aura été depuis l’âge de 13 ans jusqu’à sa mort, le porte flambeau du rythme traditionnel tchinkounmin et de la culture béninoise. Producteur agricole hors pair, ayant foi en la terre nourricière et maîtrisant les rouages d’ensemencement de plusieurs cultures vivrières, il a emblavé à sa mort plus de 130 hectares de terre. Fort de ce qu’Alokpon aura été, pour le Bénin, sur le plan culturel et agricultural, il a été  fait chevalier de l’ordre Agricole du Bénin et chevalier du mérite Sociale. C’est donc tout naturellement que  la république, se devait de lui rendre hommage à sa mort.  C’est donc ce qu’a fait au nom de la nation le ministre Jean-Michel Hervé B. Abimbola, accompagné pour l’occasion de son homologue garde des sceaux Valentin Djènontin. Les honorables députés, Valère Tchobo et Edmond Agoua natifs de la région Mahi n’ont pas manqué à l’appel. Devant un parterre impressionnant d’artistes, de personnalités, de la presse nationale et internationale, Alokpon a reçu les honneurs du Bénin. Une cérémonie faite de chants, de danses, de souvenirs vivaces de l’illustre disparu et d’oraisons funèbres. Au cours de cette cérémonie, un film documentaire réalisé par Claude Balogoun conseiller au CES et patron de Gangan Productions, sur la vie de l’artiste, a été projeté. Dans ce documentaire, le roi du tchinkounmin a fait la genèse du rythme tchinkounmin, de comment il l’a modernisé à sa manière en y ajoutant d’autres formes de gongs et d’autres instruments musicaux traditionnels.  Son amour pour la terre n’a pas été omis. Il raconte comme il a passé toute sa vie à cultiver la terre, sans jamais utiliser les produits chimiques (engrais), mais toujours avec d’excellentes récoltes chaque saison. Du coton, au manioc, du haricot, au soja, du maïs, aux ignames, du sorgho, au mil en passant par d’autres céréales, Alokpon aura tiré de la terre à laquelle il retourne tout ce qu’elle comporte de biens. Un exemple pour la jeunesse et ces milliers d’agronomes béninois sans emploi, car le roi Alokpon n’a jamais mis pieds à l’école, mais il s’y connait dans le domaine, plus que tous ces cadres qui sont incapables de développer ce secteur porteur au Bénin. Après ce vibrant hommage, le cortège funèbre s’ébranla vers Savalou, où son âme repose désormais en paix plus précisément à Ouèssè.

Bref aperçu du rythme Tchinkounmin

Rappelons d’entrée, que la pratique et l’exécution du tchinkounmin restent et demeurent la panache des savalois. Tiré du Zinli, rythme funèbre d’Abomey (Danxomè), le tchinkounmin, qui a pour géniteur, Adisso était aussi joué lors des cérémonies funéraires. Au fil du temps, ce rythme qui était fait de la gourde (Gotta), de gongs, de castagnettes, se modernisa. D’abord pas Adisso, dont une statue a été érigée à quelques mètres du palais royal de Savalou avec sa gourde et ensuite par Alokpon. Ce dernier qui a été bercé par ce rythme, prend contact avec lui déjà à l’âge de 13 ans. Commença alors une histoire d’amour entre lui et le tchinkounmin. Il le modernisa à sa manière, en y ajoutant plusieurs autres instruments, avec une autre approche dans l’exécution du rythme. Pendant plus de 50 ans, il l’a façonné et refaçonner. Il est aussi celui là par qui, le rythme tchinkounmin est répandu d’abord au Bénin et hors des frontières béninoises. Les béninois de  la diaspora, ressortissants de Savalou, le pratique dans tous les pays du monde. C’est du tchinkounmin que Stan Tohon a tiré plus tard le Tchink system. Alokpon demeure même après sa mort le maître incontestable et incontesté du Tchinkounmin.  

Alokpon a-t-il préparé une relève ?

Nous l’avons, dit plus haut, le Tchinkounmin est pour le savalois, ce que le Zinli est pour l’aboméen. Alors, on comprend aisément que plusieurs artistes de Savalou et régions pratiquent le Tchinkounmin. Ils sont très nombreux. Mais dans cette pléthore, l’artiste qui se distingue déjà du vivant du roi Alokpon, est bel et bien Gbèzé. Ce dernier revendiquait déjà, du vivant du vieux lion, sa place de prince dans l’arène de ce rythme traditionnel. Et à la mort du roi Alokpon, les regards étaient tournés réellement vers lui. Erreur. Le tchinkounmin a encore de profondes racines dans la famille Houndeffo. Car l’un de ses enfants, Dèffodji (sur les traces de son père) du vivant du vieux, mais désormais Alokpon à la mort de ce dernier a surpris son monde le vendredi dernier avec ses frères et sœurs. Lui aux chants, un de ses grands frères batteur  de la gourde, les uns aux gongs, les autres aux castagnettes, ils ont démontré de fort belle manière que pour longtemps encore la famille Houndeffo fera parler d’elle dans l’exécution de ce rythme. Avec 4 femmes et 24 enfants, le roi Alokpon aura laissé une progéniture fortement ancrée dans les réalités traditionnelles savaloises, dans le tchinkounmin et dans l’agriculture. Du timbre vocal, à la danse, de l’improvisation, à l’exécution du rythme, on aurait dit que c’est le roi Alokpon qui prestait. Ceci dénote, de l’intelligence de l’homme et du travail combien énorme qu’il a abattu, pour une relève de qualité, contrairement à ses pairs, Yédénou Adjahoui et Dossou Lètriki, qui c’en sont allés avec le bon Massègohoun. Salut l’artiste et que la terre que tu as tant aimé te soit légère.

   

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